Question
Quel est le principe du double effet ?
Réponse
Le double effet est une application de l'éthique normative utilisée pour déterminer l'action la plus éthique lorsqu'un acte destiné à aider produit également un effet secondaire moralement nuisible. Elle est principalement utilisée par les théologiens et bioéthiciens catholiques pour les traitements médicaux susceptibles d'entraîner un avortement ou une euthanasie, ainsi que dans les discussions sur les stratégies de guerre juste.
Le principe du double effet trouve son origine dans la Summa Theologiae de Thomas d'Aquin. Dans la Question 64, Meurtre, Article 7, Thomas d'Aquin discute de la moralité de la légitime défense. Il part de la conviction d'Augustin que tuer en cas de légitime défense, bien que légal, est contraire à l'éthique. Augustin pensait qu'il est mal de tuer simplement pour vivre sans craindre de perdre involontairement quelque chose de valeur, y compris sa propre vie ; que l'on ne devrait pas accorder plus d'importance aux possessions qu'à l'intégrité morale. D'Aquin énumère ensuite d'autres arguments contre le fait de tuer en cas de légitime défense. L'un d'eux est que, si une personne ne doit pas commettre d'adultère pour sauver sa vie, elle ne doit certainement pas tuer, puisque le meurtre est pire que l'adultère. Un autre est que Romains 12:19 nous dit de ne pas chercher à nous venger. L'argument est que l'autodéfense est pire que la vengeance parce qu'elle agit non pas en réponse à un mal mais en anticipation de celui-ci.
Thomas D'Aquin conclut alors que l'autodéfense est soutenue par la loi naturelle, mais seulement si une violence appropriée est utilisée. Si la réaction de la victime visée est disproportionnée par rapport à la menace et que la mort s'ensuit, l'acte d'autodéfense est immoral. Il est contraire à l'éthique de prendre la vie d'autrui, mais il est également contraire à l'éthique de craindre de prendre la vie d'autrui au point de ne pas défendre la sienne. Tuer intentionnellement n'est moral que si l'on est mandaté par une autorité, comme dans le cas d'un soldat ou d'un officier de justice.
Plus tard, les éthiciens ont adapté la conviction de Thomas d'Aquin sur l'autoconservation pour couvrir toutes les situations dans lesquelles l'acte d'apporter un bien peut avoir un effet secondaire moralement nuisible, en particulier la mort. Ils sont parvenus à quatre principes qui caractérisent le double effet :
1. L'acte lui-même doit être moralement bon ou neutre ;
2. Bien que l'agent puisse prévoir un dommage moralement grave, il ne doit pas le désirer ;
3. Le bon résultat doit résulter de l'action et non de l'effet négatif ;
4. La valeur du bon résultat doit l'emporter sur le préjudice de l'effet négatif.
Les principes du double effet englobent les principales catégories de l'éthique normative. La déontologie et l'éthique chrétienne permettent d'identifier un acte comme mauvais ou bon. Le désir de l'agent reflète son caractère, ce qui est abordé dans l'éthique de la vertu. L'ordre et la nature des effets bons et mauvais peuvent être liés au relativisme éthique. Enfin, la conviction que le bien doit l'emporter sur le mal est une application du conséquentialisme.
Le double effet peut s'appliquer à de nombreux scénarios différents, mais il est principalement utilisé par les professionnels de la santé pour déterminer si un traitement est éthique. Dans les hôpitaux catholiques en particulier, les deux situations les plus fréquemment examinées concernent l'avortement et l'euthanasie.
Appliqué à l'euthanasie, le principe du double effet met en balance le soulagement de la douleur, qui est une bonne chose, et le raccourcissement éventuel de la durée de vie, qui est une mauvaise chose. Le double effet détermine que les médicaments ne peuvent être administrés que si l'objectif premier est de soulager la douleur et non de hâter la mort.
Le cadre du double effet est parfois utilisé pour déterminer l'étendue du traitement médical. Par exemple, si une femme a une grossesse extra-utérine, il est entendu que le bébé ne vivra pas et que la mère ne vivra peut-être pas. L'ablation précoce du fœtus est une procédure simple, mais il s'agit techniquement d'un avortement. Le médecin peut donc choisir d'enlever la totalité de la trompe de Fallope. L'ablation de la trompe de Fallope n'est généralement pas nécessaire, mais elle permet de considérer que la mort du bébé n'est pas la cause de la survie de la mère, mais seulement une conséquence.
Le double effet est également utilisé dans les discussions sur les questions de guerre. Il est considéré comme éthique de bombarder une installation militaire ou une cible stratégique, telle qu'un pont, même si des civils sont présents, car la mort de civils, bien que prévue, n'est pas souhaitée. En revanche, le bombardement de civils dans le but de démoraliser le gouvernement pour qu'il se rende est considéré comme contraire à l'éthique, car le bien (démoralisation) est une conséquence directe du mal (pertes civiles). Dans de tels cas, des mesures sont souvent prises pour atténuer le préjudice, par exemple en informant les civils de l'imminence du bombardement avant de détruire l'infrastructure.
L'aiguillage d'un chariot, un dilemme éthique traditionnel, peut également être analysé à l'aide du double effet. Un chariot roule à toute allure sur une voie, à l'approche d'un Y. Devant lui se tiennent cinq personnes qui ne peuvent pas bouger. En travers d'une voie adjacente se tient une personne. Selon le principe du double effet, un passant peut actionner l'aiguillage et dévier le chariot de manière à ce que cette personne meure plutôt que les cinq autres. Le désir est de sauver les cinq personnes ; l'acte est d'aiguiller la voie. La mort d'une personne n'entraîne pas directement le sauvetage des cinq autres ; il s'agit d'un effet secondaire prévu mais non désiré, qui a proportionnellement moins de poids que la mort de cinq personnes. Le spectateur ne peut cependant pas jeter une autre personne devant le chariot pour l'arrêter. La personne écrasée arrêterait le chariot, mais le sauvetage des cinq vies serait le résultat direct de la mort de la personne et serait donc contraire à l'éthique.
Le double effet peut être utilisé pour un certain nombre d'autres questions. Est-il éthique d'utiliser des vaccins pour prévenir des maladies mortelles si une poignée de personnes sont victimes d'affections telles que le syndrome de Guillain-Barré ? Est-il éthique qu'un soldat plonge sur une grenade active si sa mort sauve directement ceux qui l'entourent ? L'expropriation est-elle éthique si un nouveau barrage permet de contrôler les inondations et de fournir de l'électricité, même si plusieurs maisons sont détruites ? Est-il juste de couper une main coincée par un rocher si l'alternative est de mourir de froid ?
Le principe du double effet n'est pas un outil absolu. Les actes eux-mêmes ne sont pas toujours bons ou mauvais. Des questions subsistent : l'application du double effet peut-elle contredire un testament de vie ? Dans quelle mesure l'agent agissant doit-il s'efforcer de minimiser les risques et l'étendue du préjudice ?
Le double effet est utile en ce qu'il donne aux agents la possibilité de ralentir et de réfléchir aux conséquences de leurs actes. Il apporte également la paix aux professionnels de la santé confrontés à des décisions difficiles qui n'ont pas de réponse biblique évidente. Bien entendu, les décisions difficiles doivent toujours être prises dans la prière et en se soumettant à la direction de l'Esprit Saint. Le bien de Dieu est infiniment plus grand que la considération de l'homme. Comme le dit Jacques 1:5 : "Si quelqu'un d'entre vous manque de sagesse, qu'il la demande à Dieu, qui donne à tous généreusement et sans faire de reproche, et elle lui sera donnée".
English
Quel est le principe du double effet ?